Une nouvelle ère pour la sécurité routière dans le transport de marchandises

Les caméras embarquées, désormais équipées d’intelligence artificielle, représentent une avancée majeure dans le suivi et l’assistance à la conduite. Ces dispositifs permettent, par exemple, de détecter en temps réel des signes de fatigue, des distractions ou des comportements pouvant compromettre la sécurité routière.

Cependant, ces outils innovants soulèvent des questions légitimes sur le respect de la vie privée et des données personnelles des conducteurs. Pour les employeurs du secteur du transport, l’enjeu est double : renforcer la sécurité tout en assurant une stricte conformité aux règles juridiques et éthiques.


Pourquoi intégrer des caméras augmentées dans les véhicules ?

Les entreprises de transport, notamment celles opérant avec des matières dangereuses, ont des responsabilités accrues envers leurs conducteurs, leurs marchandises et les autres usagers de la route. Les caméras augmentées poursuivent généralement trois objectifs principaux :

  1. Réduire les risques d’accidents et protéger les biens, les personnes et l’environnement.
  2. Former et sensibiliser les conducteurs en leur fournissant des retours d’expérience précis.
  3. Évaluer les comportements de conduite pour identifier les besoins d’amélioration.

Toutefois, l’utilisation de ces technologies doit être mesurée et respecter un équilibre entre les impératifs de sécurité et les droits fondamentaux des salariés.


Une base légale incontournable : l’intérêt légitime

La mise en place de caméras dans les habitacles des véhicules professionnels repose généralement sur l’intérêt légitime de l’employeur. Cela implique de justifier que ces dispositifs :

  • Ne sont pas imposés par une obligation légale, mais répondent à un objectif de sécurité spécifique.
  • Ne nécessitent pas le consentement individuel des conducteurs, car ce dernier ne serait pas considéré comme libre dans un cadre de subordination.
  • Respectent le droit à la vie privée et les données personnelles, comme stipulé par le Code du travail (article L. 1121-1) et le Règlement général sur la protection des données (RGPD).

En outre, l’employeur doit démontrer la nécessité et la proportionnalité de ces dispositifs, notamment via une analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD).


Garantir le respect des droits des conducteurs

1. Limiter la collecte et l’utilisation des données

Les caméras augmentées doivent uniquement traiter les données nécessaires à leur fonction, comme les alertes en temps réel. Une fois l’alerte passée, ni les images ni les données techniques (géolocalisation, horodatage, etc.) ne doivent être conservées, sauf pour des finalités clairement définies et justifiées.

En conformité avec le règlement UE 2019/2144, les systèmes d’avertissement de somnolence ou de distraction doivent fonctionner en circuit fermé, sans permettre l’identification du conducteur par des tiers non habilités (employeur ou prestataire).

2. Informer les salariés et les parties prenantes

Les conducteurs doivent être pleinement informés :

  • Des finalités des caméras et des données collectées.
  • Des éventuelles utilisations disciplinaires, à préciser dans le règlement intérieur ou tout document interne pertinent.

L’employeur est également tenu de consulter les instances représentatives du personnel (CSE) avant la mise en œuvre de ces dispositifs.

3. Éviter les abus et respecter la vie privée

Les caméras ne doivent pas filmer en continu les conducteurs pendant leur temps de travail. De plus, elles doivent être orientées de manière à éviter d’enregistrer d’autres personnes (passants, conducteurs externes, etc.).


Des technologies prometteuses, mais à utiliser avec précaution

Les caméras augmentées apportent des solutions concrètes pour améliorer la sécurité routière et optimiser les performances des conducteurs. Cependant, leur mise en œuvre exige une approche réfléchie et rigoureuse.

Pour les entreprises de transport, la clé du succès réside dans la transparence, la proportionnalité et le respect des droits des salariés. En s’appuyant sur des outils conformes aux réglementations et en impliquant toutes les parties prenantes, il est possible de tirer pleinement parti de ces innovations tout en protégeant la relation de confiance entre employeurs et conducteurs.


Références utiles :